Pas de souci
EAN13
9782374912813
Éditeur
Quidam
Date de publication
Collection
Made in Europe
Langue
français
Langue d'origine
français
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Pas de souci

Quidam

Made in Europe

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Le livre est une comédie noire qui se déroule dans un univers utopique : le
nôtre, sans pandémie. Il y est question d’une femme de trente ans
d’aujourd’hui, Chloé, qu’accable une fatalité vague, une absence de problème
identifiable. Fille unique d’un couple de retraités épanouis, exerçant sans
passion la profession d’audiodescriptrice, elle travaille sur des successions
de séries télévisées où s’agitent des personnages de sa génération, mieux
définis et plus clairement dominés qu’elle. Lorsque sa thérapeute lui assure
qu’elle souffre sans le savoir d’un lourd secret, que ses parents, depuis
toujours, lui cachent quelque chose, un espoir paradoxal la galvanise. Bercée
par l’euphorie que suscite cet accès de complotisme intime, elle passe son
passé au crible de ses soupçons tout neufs, flaire, pressent, subodore. Son
enfance ne fut pas parisienne. Elle s'est déroulé dans une petite ville
normande, Vinteuil-sur-Iton, pétrifiée dans la légende familiale. Ses parents
l’y conçurent et l’y élevèrent. L’épopée originelle compte d’autres héros : un
couple jumeau, Cécile et Laurent, doté d’un fils, Maxime, frère de cœur de
Chloé, alter-ego moins tourmenté, plus contemporain qu’elle. Les deux pères
sont collègues et complices, les deux mères s’adorent. Juste avant que les
enfants ne basculent dans l’adolescence, les deux familles quittent Vinteuil
pour s’établir dans la capitale. Chloé n’est jamais retournée en Normandie
depuis lors. Il est temps, sans doute, d’envisager ce pèlerinage.
Parallèlement à l’histoire de Chloé, le livre raconte celle de Patricia, née
en 1972 et qui a toujours résidé à Vinteuil. Patricia semble s’accomplir dans
son travail d’aide à domicile. Elle est tout pour ceux qui ne sont rien, ou
plus grand-chose, cas sociaux, assistés, fossiles interlopes. Patricia les
visite, les revigore, les ressuscite. Parmi eux, Gérard est fou d’elle.
Dangereusement fou. On en sait peu sur Gérard, sinon qu’il boit trop et salit
beaucoup. Il aime à se mettre nu pour accueillir Patricia. Son CV lacunaire
indique qu’il a posé jadis pour des catalogues de vente par correspondance,
travaillé dans un abattoir, pratiqué la chasse avec son père. Avant Patricia,
il a aimé Corinne, qui est morte. Gérard est sous curatelle. Il y a aussi
Lucette, vieille dame chancelant sur la corde raide. À la différence de Chloé,
Patricia connaît bien le visage de son malheur. Le sort l’a frappée deux fois,
avec insistance et méchanceté, recourant paresseusement au scénario éculé de
l’accident de la route pour lui arracher ses parents puis son grand frère
chéri. Au même endroit qui plus est, à la sortie de Vinteuil, sur la route
d’Évreux, ils furent tous trois aplatis par le même hêtre. Outre les
sursitaires de la déchéance, Patricia visite aussi ses morts. Le livre
raconte, entre autres, comment la quête de Chloé va la mener à Patricia,
comment leurs mondes vont se télescoper. Une histoire apocalyptique, donc.
C’est que Chloé ne lâche rien, enquête, questionne, tourmente ses parents trop
heureux. Or, à qui réclame sa part de catastrophe, les dieux aiment donner
satisfaction. Si le récit s’intéresse d’abord et surtout à ses personnages, il
effleure, ce faisant, quelques-unes des questions posées par l’époque, et nous
aide à ne rien comprendre aux formes nouvelles revêtues par l’éternel
malentendu entre les êtres, à l’heure de la transparence et des paroles
libérées. Les parents de Chloé, Véronique et Jean-Charles, n’ont jamais su se
défaire de l’optimisme propre à leur génération conquérante, consumériste,
libérale. Ils aiment leur bonheur petit bourgeois, fétichisent la technique,
croient au progrès. Nés au bon moment, ils n’ont rien vu venir. Ils sont
gourmands de bien-être, consomment de la culture, voyagent. Les antagonismes
contemporains leur apparaissent comme d’intéressants divertissements. Ils ne
sont pas insensibles aux malheurs du monde, Cécile et Véronique donnent de
leur temps aux pauvres, aux migrants. Mais, avant tout, les quatre parents
profitent de leur retraite à taux plein et entretiennent leur corps. Peut-être
la souffrance diffuse de Chloé est-elle générationnelle. Elle a toujours fait
preuve d’une sensibilité maladive. Peinant à nouer des liens authentiques,
refusant plus ou moins le modèle de couple proposé par ses géniteurs, elle
erre dans sa vie, éternelle spectatrice du temps qui passe. Si elle se lance
dans une thérapie, c’est sur les conseils de Maxime, qui déplore de la voir
exploiter si peu son potentiel. Si elle se trouvait enfin, se réconciliait
avec elle-même, Chloé pourrait peut-être devenir cinéaste, plutôt
qu’audiodescriptrice. Et rencontrer l’amour, après tout. Il existe aujourd’hui
des psychologues alternatifs, plus cools, moins coincés, moins lacaniens
qu’autrefois qui peuvent aider à trouver blessure à son pied, caillou dans sa
chaussure, malaise en sa maison. Car sous ses dehors bienveillants, ouverts,
l’époque est cruelle. Bavarde, saturée de discours et de théories, polarisée,
pressante, elle exige que chacun prenne sa place dans la farandole des
douleurs. De vastes chapelles s’érigent, des communautés planétaires. YouTube
devient un speakers’ cornermondial où résonnent les prêches et s’affrontent
les vérités. Pour les enfants de la bourgeoisie, les choses étaient plus
simples aux temps du Mal du Siècle. Il n’était, alors, que de revêtir les
oripeaux du romantisme ou de mettre fin à ses jours pour donner un sens à sa
vie. Et la société marchande étant enfin parvenue à faire tomber en désuétude
la lutte politique, il faut trouver ailleurs les voies d’un développement
personnel et durable, fût-ce dans les formes nouvelles que revêt la vérité.
Voilà donc l’arrière-plan moral ou sociologique de cette petite comédie
tragique où l’on parle beaucoup mais toujours à côté de ce qui se joue, sans
jamais voir ce qui se cache. La pensée neutralisée par les éléments de langage
ou les dialogues de série, les posts, les polémiques pavloviennes, se détourne
du monde et substitue des silhouettes aux individus, ramenés au rôle qu’on
leur prête. On croisera dans cette histoire des espèces de boomers et des
pseudo-millenials, on y errera dans la mégapole, dans la France périphérique,
dans la forêt, on y retrouvera la fausse vacuité des années 90 où
s’élaboraient les horreurs d’aujourd’hui. Point aveugle du drame, une bâtisse
inachevée, la maison d’amis. Phalanstère de poche serti dans le glorieux passé
normand, rêve abandonné, elle renferme un secret. Un secret authentique,
idéal, offrant le bon dosage d’amour et de mort. Le secret qui manque à Chloé
pour être parfaitement malheureuse. Au plan narratif, le livre se présente
comme une succession de brefs chapitres centrés sur un personnage focalisé sur
lui-même. Les points de vue s’y contrecarrent, les faux mouvements s’y
harmonisent insensiblement pour produire une mécanique désastreuse. Au fond,
il s’agit d’humains qui s’en vont mourir sous des arbres. Luc Blanvillain naît
le 7 novembre 1967 à Poitiers. Après des études de lettres, à Orléans et à
Tours, il passe les concours de l’Éducation Nationale (CAPES et agrégation) et
devient professeur de lettres. Il enseigne à Verneuil-sur-Avre, en Normandie,
puis à Lannion, en Bretagne. Son goût pour la lecture et pour l’écriture se
manifeste dès l’enfance et se caractérise d’emblée par un éclectisme gourmand.
Il s’enthousiasme pour les romans d’aventures, la bande-dessinée, la science-
fiction, avant de découvrir, au lycée les œuvres du patrimoine classique, le
théâtre et la poésie. Chaque lecture provoquant irrésistiblement chez lui un
désir d’écriture, il touche à tous les genres, compose des pièces de théâtre,
des chansons, des nouvelles, avant de se spécialiser dans le roman. Les récits
pour la jeunesse lui permettent de retrouver l’émerveillement de ses premières
lectures. Ils lui offrent également la possibilité d’aborder certaines
questions liées au monde de l’adolescence, et qu’ils jugent importantes.
L’adolescence est pour lui une terre de jeu où il a plaisir à faire se
rencontrer les grands mythes littéraires et la novlangue de la com’, des
geeks, des cours de collèges et de lycée. Ses personnages, même s’ils sont
embarqués dans une course ...
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